DEVOIR DE MÉMOIRE OU COMMÉMORATION ?
Notre association a participé à un « devoir de mémoire » lors du 80° anniversaire des convois de déportation du camp des Milles vers Auschwitz (voir article précédent)
Lors de nos cérémonies commémoratives, du 14 juillet, 11 novembre voir Camerone, il n’est pas rare d’entendre certains parler de « devoir de mémoire », c’est pourtant une expression juridiquement très précise.
Ont-ils raison d’employer cette expression?
La commémoration
Une commémoration renvoie au fait de choisir une date, ou un objet, une rue, un monument pour entretenir le souvenir. Les commémorations sont mises en place en mémoire d’événements de l’histoire collective, nationale ou internationale, et ont pour vocation d’en perpétuer le souvenir et de servir d’exemple. Une cérémonie est organisée pour entretenir la conscience collective de la communauté de référence et engage autant les dignitaires que la population.
Le devoir de mémoire
Le « devoir de mémoire » entend remédier à l’amnésie collective pour éviter que les dérives idéologiques ayant conduit à des persécutions ne se reproduisent. Le devoir de mémoire se distingue de la commémoration officielle instituée par une collectivité ou un Etat à la mémoire de héros ou de victimes.
La tradition des cérémonies de commémoration ne doit pas être confondue avec celle du devoir de mémoire. En effet, l’expression « devoir de mémoire » implique le souvenir d’épisodes tragiques de l’histoire et de leurs victimes autrement dit un « crime contre l’humanité ».
C’est une expression qui est apparue dans les années 1990 pour faire suite à la seconde guerre mondiale et à la Shoah puis qui tend à s’élargir à d’autres événements, comme l’esclavage par exemple.
Le devoir de mémoire est une expression qui désigne et postule l’obligation morale de se souvenir d’un événement tragique et de ses victimes, afin de faire en sorte qu’un événement de ce type ne se reproduise pas.
Le devoir des Etats de maintenir le souvenir des souffrances subies dans le passé par certaines catégories de la population apparaît comme impératif surtout s’ils en portent la responsabilité (en tant qu’état, non en tant que nation ou que régime politique, car c’est après un changement de régime que le devoir de mémoire, et d’éventuelles réparations deviennent possible.)
Par rapport à la tradition du droit de la paix et de la guerre, le « devoir de mémoire » s’oppose à la clause d’amnistie des traités de paix, qui dans un souci d’apaisement (retour à la paix), imposait l’oubli de tous les griefs passée relatifs au conflit, et interdisait de les évoquer.
Le devoir de mémoire est le rappel d’un « crime contre l’humanité » donc imprescriptible, c'est-à-dire qu’il sera toujours possible d’engager des poursuites judiciaires contre leurs auteurs même dans un laps de temps très long. Exemple du « génocide Arménien » qui date de 1918 et que la Turquie ne reconnaît pas.
Alors, lorsque vous allez participer à la cérémonie de Camerone :
Devoir de mémoire ou pas ?
PYC